Le pu er est le plus connu des thés sombres, nommés thé noir ou hei cha, en Chine. Il peut se bonifier et s’affiner le temps. Suivant le type de stockage sec ou humide, il évoluera différemment.
L’appellation pu er (ou pu’er ou pu erh suivant les traductions) est une certification du Yunnan qui protége les terroirs et le façonnage de ces thés. D’autres provinces chinoises, telles que le Guangxi ou le Guangdong, et d’autres pays tels que la Thaïlande, le Vietnam, la Birmanie ou le Laos produisent aussi des thés sombres.
La transformation du thé sombre s'appuie sur 2 process : une oxydation enzymatique plus ou moins importante combinée à une fermentation microbienne plus ou moins intense qui évoluent au fil du temps d'affinage ou de maturation.
La première étape, juste après la récolte, est le flétrissage pendant quelques heures pour que les feuilles commencent à se déshydrater, et donc se ramollir. La deuxième étape est, comme pour le thé vert, la fixation à la chaleur douce sèche pour « tuer le vert » (sha qing), c’est en fait tuer l’oxydation enzymatique. Mais, contrairement au thé vert, la fixation beaucoup plus douce permet de laisser une part d’oxydases actives. Les tea maker peuvent ainsi jouer sur cette activité résiduelle d’oxydation enzymatique qui contribuera à un style de maturation au fil des ans. Actuellement c’est la mode des green pu ers c’est-à-dire où il reste très peu d’activité enzymatique. Ensuite les feuilles sont roulées (rou cha) pour faire sortir le jus et permettre une homogénéité de la maturation par la suite. Elles prennent alors leur forme oblongue torsadée caractéristique. Elles sont ensuite entreposées au soleil, ou en véranda, de plusieurs heures à plusieurs jours, on dit qu’elles cuisent à petit feu, en fait elles continuent de se déshydrater progressivement. On arrive alors à un thé brut nommé le mao cha. Il est ensuite trié, on enlève notamment toutes les feuilles jaunes, puis il peut être stocké en vrac souvent en jarre, ou compressé. C’est le pu er sheng cha ou pu er cru ou raw pu er.
Dans les années, 1970, les Chinois ont mis au point une autre technique : le wo dui (littéralement tas humide). C’est la naissance des pu ers shu ou mûrs ou ripe pu ers. L’objectif initial était de retrouver, en accéléré, les caractéristiques du pu er cru, ou sheng, âgé ayant maturé en stockage humide. En effet, l’un de leurs gros marchés consommateurs était Hong Kong qui était habitué à consommer de vieux pu er sheng stockés en stockage humide à Hong Kong, ce qui les faisaient évoluer totalement différemment d’un stockage sec que l’on peut avoir chez les producteurs dans le Yunnan, ou bien chez des collectionneurs en Malaisie ou à Taiwan. Le résultat est que cela a donné naissance à un autre style de pu er qui a plu au marché hong kongais mais qui n’a jamais donné un équivalent de vieux pu er sheng stocké en stockage humide !
On part toujours du même matériel, le pu er sheng. En général, on utilise des feuilles de moindre qualité, rarement des feuilles issues de grands arbres ou vieux arbres cultivés ou sauvages, mais plutôt issues de cultures en terrasse. Une fois le thé séché, on le met en piles d’environ 60 cm d’épaisseur, on humidifie cette pile et on la brasse régulièrement pour assurer une moisissure homogène des feuilles où bactéries et champignons agissent sur l’évolution de la feuille. Cette étape dure une quarantaine de jours, c’est le wo dui. Puis on le sèche et on le laisse en vrac, ou on le compresse. Il y a donc une fermentation microbienne accélérée et amplifiée que l’on a naturellement sur les pu er sheng cha mais de manière beaucoup plus lente et diffuse en plus d’une oxydation naturelle au fil des ans. C’est tout un art que de gérer cette fermentation pour que ce soient les bons ferments qui se développent et pas les mauvais qui donneraient un goût de moisi au thé.
Les pu er peuvent être compressés sous diverses formes pour leur affinage. Historiquement, ce mode de conservation était pratique à transporter, bien moins volumineux qu'en vrac, mais aussi à troquer, ce fut pendant plusieurs siècles une véritable monnaie d’échange. Les formes et les poids sont variables. Parmi les plus courantes, la galette, ou chi tse beeng cha, qui fait environ 300g, le nid d’oiseau, ou tuo cha, qui fait quelques 100g, la brique de gabarit variable, il y a aussi le champignon, le melon, etc.
Suivant qu’il est cuit ou cru, il présente des notes aromatiques très variables et très typées allant des notes veloutées sous-bois, humus ou animales pour le pu er mûr à des notes orientales de l’univers des parfums telles que le patchouli, le cèdre ou le santal avec une certaine vivacité pour un beau pu er cru.
Si vous voulez approfondir, je vous invite à lire les 10 portraits de pu er présentés dans mon ouvrage Portraits de Thés : Voyage dans 40 pays producteurs, où j'explique, au fil des portraits, les spécificités de terroirs, de théiers, de stockage, etc.
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